lundi 6 avril 2009

Quel est le profil des prédateurs sexuels sur Internet?

Le Crime Against Children Research Center de l'Université du New Hampshire aux USA vient de publier les résultats de son étude longitudinale sur le profil des pédateurs sexuels arrêtés par la police aux États Unis en 2006 (la première étude avait été menée en 2001). Les données proviennent directement des enquêteurs qui ont procédé aux arrestations, ce qui constitue un excellent exemple de collaboration entre chercheurs et praticiens, et permet de produire des connaissances nouvelles qui permettent de discréditer un certain nombre de mythes sur la dangerosité de l'Internet pour les enfants et les adolescents.

Parmi les résultats les plus intéressants:

  • Entre 2000 et 2006, le nombre de prédateurs arrêtés qui avaient sollicité des mineurs en ligne afin de les convaincre d'avoir des rapports sexuels a augmenté de 21%, alors que le nombre de prédateurs arrêtés après avoir contacté des policiers se faisant passer pour des mineurs a augmenté de 381%. Cela semble indiquer que les organisations policières nord américaines sont très actives, et mêmes proactives, dans ce domaine. En effet, pendant la même période, le nombre total d'arrestations pour abus sexuels commis contre des mineurs diminuait de 10%.
  • Les arrestations de prédateurs sexuels en ligne représentent seulement 1% de l'ensemble des arrestations pour abus sexuels de mineurs, et la majorité des victimes d'abus sexuels ont toujours plus à craindre des membres de leur famille ou de leur entourage que d'inconnus rencontrés sur Internet.
  • Dans l'immense majorité des arrestations impliquant des victimes mineures, les victimes avaient plus de 13 ans (95%), elles étaient informées des attentes des prédateurs, et seulement 5% des rencontres impliquaient des violences imposées aux victimes (et 2% des enlèvements). Cela confirme les résultats de 2001 selon lesquels les victimes étaient en grande majorité des participantes informées prenant une part active aux abus sexuels, et que la nature de l'abus reposait majoritairement sur l'incapacité légale de fournir un consentement éclairé.
  • Contrairement à une crainte couramment répandue, les sites de réseaux sociaux ne semblent pas exposer les adolescents à du harcèlement ou des enlèvements facilités par les informations personnelles mises en ligne.
  • La plupart des prédateurs sont des hommes (99%) blancs (84%) qui n'ont jamais été arrêtés auparavant pour des crimes contre des mineurs (90% pour ceux impliquant des victimes mineures et 97% pour ceux arrêtés par des policiers prétendant être des mineurs). Il semble donc que les efforts imposés aux sites de réseaux sociaux afin d'éliminer de leurs fichiers les personnes déjà condamnées pour des abus sexuels contre des mineurs soient relativement inutiles et consistent principalement en un exercice incontournable de relations publiques.
  • Un changement notable concerne le rajeunissement des suspects, dont 40% sont âgés de 18 à 25 ans contre 23% en 2001. Cette augmentation ne correspond pas à une augmentation générale des arrestations pour abus sexuels dans cette tranche d'âge et peut s'expliquer soit par de nouvelles pratiques déviantes qui se manifestent d'abord en ligne chez cette génération, soit par l'effacement des frontières de socialisation sexuelle entre jeunes adultes âgés de 13 à 25 ans.
Outre la réussite des organisations policières dans la lutte contre les prédateurs sexuels que cette étude semble indiquer, une approche renouvelée dans la conception des programmes de prévention destinés aux adolescents paraît indispensable. Au lieu de mettre l'accent sur des risques de violence, de viol et d'enlèvement qui semblent marginaux, les campagnes de sensibilisation s'adressant aux jeunes devraient plutôt décourager ceux-ci d'échanger des propos et des images sexuellement explicites avec des inconnus, de se lancer dans des relations amoureuses et sexuelles avec des adultes, et les sensibiliser aux interdictions légales entourant de telles rencontres. 

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